Notes d’inventaire

La ligne défensive de Marchand-Dessalines est composée de six ouvrages fortifiés placés selon une droite d’orientation approximative Nord-Sud. Toutes ces fortifications, le fort La Source excepté, se situent au sommet des montagnes environnant la ville et dominent la partie haute de la vallée de l’Artibonite. Elles établissent entre elles une parfaite communication visuelle.

Les caractéristiques typologiques de ces ouvrages s’inspirent tous du système de fortification bastionnée de Vauban, avec des adaptations originales dues aux exigences de la  topographie. Ils sont tous faits de forte maçonnerie de moellons et de pierres de taille aux arêtes des bastions, aux ouvertures des bouches à feu (embrasures à canon ou meurtrières) et aux autres  ouvertures;

Le fort Culbuté ou fort La Source, de toute évidence, a été construit afin de défendre l’entrée Est de la ville de Marchand dont l’avancé des montagnes sur la plaine obstrue la vision et pourrait ainsi favoriser une attaque par des troupes ennemies. Il protège également les sources d’eau alimentant la ville.

 Le plan du fort La Source est celui d’un bastion unique de forme classique : deux faces et deux flancs symétriques enserrés par une gorge. Il semblerait que cet ouvrage utilisait les pentes abruptes de la montagne à laquelle il est adossé comme fermeture.

Construit en maçonnerie de moellons liés au mortier de chaux, ce bastion est formé d’un terre-plein enserrant une large cour. Sur la face interne du flanc Est, est adossée une poudrière. A l’extérieur du fort, un bassin, nommé Bassin-Félicité, est alimenté par les sources avoisinantes.

Le fort Culbuté a subi une première restauration en 2000, réalisée par l’architecte Harold Gaspard pour le compte du Ministère de la Culture. Cette opération a pu sauver le monument historique d’une disparition imminente. En effet, construit dans une zone marécageuse, la dégradation de la maçonnerie était fort avancée avant cette intervention. Cette restauration a respecté scrupuleusement les prescrit des normes internationales qui veulent que toute opération de restauration s’arrête là où commence l’hypothèse….

En 2007, le fort a subi une seconde intervention au niveau de la poudrière exclusivement. Elle fût entreprise sur
l’initiative des riverains. Cette opération consista en l’assèchement du sol intérieur de la poudrière et la  “stylisation” de sa façade.

En 2008, l’ISPAN, dans le cadre des aménagements préliminaires du Parc National Historique de Marchand-Dessalines, a repris les travaux de restauration et des fouilles archéologiques qui permirent une meilleure compréhension du site. Une intervention au niveau de la poudrière permit la restitution de la façade défigurée par les interventions de 2007. Tenant compte de l’utilisation religieuse du site, le parquet de la poudrière fut aménagé ainsi qu’un espace extérieur pour les cérémonies voudoues qui s’y  tiennent régulièrement, chaque jeudi.

Le fort Décidé, vu en plan, représente un carré de 18 m par 18 m environ, flanqué de quatre bastions d’angle. Elle est faite de maçonnerie de pierres calcaires blanches, caractéristiques de la zone. Sur sa place d’armes, on trouve un réservoir destiné à l’origine, à stocker l’eau de pluie recueillie des toitures, aujourd’hui disparues.
Une poudrière encore en bon état de conservation longe la courtine Nord. Une casemate voûtée, à l’abri des tirs ennemis, est logée dans le bastion Sud-Ouest. Sa voûte s’est effondrée et un canon en fonte repose sur le sol presqu’enfoui sous les décombres. L’accès au fort est placé à l’Est (coté opposé à la ville) et est contrôlé par un sas percé de meurtrières. Placé sur éminence surplombant de très proche la ville, le fort Décidé offre au visiteur une vue particulièrement saisissante sur Marchand Dessalines et la vaste vallée de l’Artibonite. Le fort couvre une superficie d’environ 800 mètres carrés.

De h. en b. : le Fort Culbuté, le fort Décidé, le Fort Doko, le Fort Innocent, le Fort Madame et le Fort Findu-Monde, à la même echelle.
De h. en b. : le Fort Culbuté, le fort Décidé, le Fort Doko, le Fort Innocent, le Fort Madame et le Fort Findu-Monde, à la même echelle.

Le fort Innocent, outre sa fonction militaire, servait également, selon ce que rapporte la tradition orale, de résidence secondaire à Innocent Dessalines, le fils de l’Empereur, d’où l’origine du nom de la fortification. Quoique réalisé en de solides murailles, le fort Innocent est actuellement en très mauvais état de conservation. Tout porte à croire qu’il ait été pendant longtemps la proie d’actes sévères de vandalisme. Le fort Innocent est constitué d’un mur d’enceinte polygonal s’élevant hors terre sur une hauteur d’environ 6 m en moyenne et
de 10 m par endroit. En son centre s’élèvent encore les ruines d’une bâtisse aux puissants murs, épais d’environ 1,50 m et percés d’arcades régulières. L’extrémité Sud de l’ouvrage se termine par une terrasse semi-circulaire à partir de laquelle on a une vue panoramique sur la ville de Marchand et la vallée de l’Artibonite.

Le fort Madame est le plus important par ses dimensions de toutes les fortifications de Marchand-Dessalines. Il occupe une superficie brute de 2.200 mètres carrés. Son plan est celui d’un quadrilatère irrégulier épousant, le sommet de la montagne sur laquelle elle est placée. Il possède 4 bastions d’angle de forme également  irrégulière. Son mur d’enceinte est constitué d’une simple muraille percée d’embrasures et de meurtrières. Plusieurs pans de cette muraille se sont écroulés au fil du temps. Sur la place d’armes, coté Est, subsiste encore les ruines d’une poudrière.

Le fort Doko, semblable au fort Décidé, possède un plan carré dégageant une cour centrale de 13 m par 13 m. Il est également flanqué de quatre bastions rigoureusement identiques. Il est formé d’un mur d’enceinte s’élevant sur environ cinq à six mètres de hauteur. Il est percé de nombreuses meurtrières et de six embrasures à canon
réparties symétriquement sur les quatre courtines. Son entrée est située sur la façade Nord. Trois canons en fonte jonchent à même le sol hors les murs, côté Ouest. Avec ses 350 mètres carrés, il est le plus petit des fortifications de Marchand-Dessalines.

Le fort Fin-du-Monde, placé à la plus haute altitude du réseau, complète au Nord le système. Son plan est pentagonal et irrégulier afin de pouvoir mieux tirer parti du sommet de la montagne où il est situé. Il possède cinq bastions d’angle de forme irrégulière. Ces murailles enserrent une place d’armes sur laquelle sont logées
une poudrière aux murs latéraux épais de 1,35 m et des casernes de garnison dont il ne subsiste que les  fondations. L’allure volontairement trapue de cette machine de guerre lui confère une rare puissance. Le fort Fin-du-Monde couvre une superficie d’environ 1000 mètres carrés. L’histoire a retenu le nom de l’ingénieur
Zénon, le constructeur de ces fortifications. Il fût aidé dans leur exécution par Lavelanet, un officier d’artillerie. Mais, selon l’historien Thomas Madiou, c’est au Gouverneur Général Jean-Jacques Dessalines, lui-même, que nous

devons la conception des plans des fortifications de Marchand-Dessalines.

 

1er octobre 2009

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