Inscrite sur la liste indicative du patrimoine mondial, donc en attente de classement depuis 2004 suivant les critères 2 et 4 de la Convention du patrimoine mondial (échange d’influences et illustration de périodes de l’histoire), la ville de Jacmel a fait l’objet du premier inventaire scientifique de l’Institut de Sauvegarde du Patrimoine National (ISPAN) dénommé «Inventaire du centre-ville historique de Jacmel». Réalisé sur une période de deux ans (2013 à 2015), cet inventaire a été rendu possible, notamment, grâce au support du Ministère de la Culture et de la Communication (MCC), de l’Agence Espagnole de Coopération Internationale pour le Développement (AECID), de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) et du Ministère de la Culture de la France.
En effet, en février 2013, un atelier de formation et d’échanges sur la méthodologie de l’inventaire s’est tenu à Jacmel. Quatre experts français de l’Inventaire général du patrimoine culturel ont été mis à disposition par le Ministère de la Culture de la France et par la région de la Franche Comté (France). Ils ont apporté un appui technique et initié le transfert de la méthodologie de l’Inventaire général du patrimoine culturel. Il s’agit de Christian Trézin, inspecteur général des Patrimoines; Isabelle Duhau et Jean Davoigneau, experts de l’inventaire général du patrimoine culturel, et M. Laurent Poupard, expert de l’inventaire du Patrimoine de la région de Franche Comté.
En fait, l’inventaire excède à la fois, tant l’aspect du bâti que la stricte délimitation géographique du centre-ville historique(CVH). Il s’évertue à répertorier l’héritage pertinent de la commune, qu’il s’agisse du bâti, de lieux porteurs de signification, ou d’autres héritages assimilés au patrimoine. Des anciens bâtiments témoins de l’histoire en passant par les infrastructures de services (réseau de drainage et de distribution d’eau potable, d’électricité, gestion des ordures ménagères …) l’inventaire couvre tout le centreville historique. En substance, cette activité n’a que pour but d’évaluer le bâti dans son cadre urbain par rapport à l’inscription, l’inventaire devra permettre de statuer sur le dossier de conservation du CVH en vue de son classement ou non.
Il faut préciser que l’architecture civile, publique, militaire et religieuse de Jacmel (maisons vernaculaires, maisons à éléments importés, architectures en bois et en briques) constituent le socle de cette étude. En effet, du point de vue de l’originalité architecturale, ces bâtiments sont l’essence même du centre-ville historique de Jacmel. Malheureusement, ce sont eux aussi les plus menacés par les catastrophes naturelles ou le développement urbain incontrôlé.
Le travail tente de retracer le processus d’urbanisation, de conservation et de gestion des services du centre historique de Jacmel suite aux cataclysmes (inondation, 1882 ; incendie, 1896 ; cyclone, Hazel, 1954; tremblement de terre, 2010 …) qui ont affecté la ville. L’inventaire est destiné, par ailleurs, à la compréhension des systèmes constructifs, de leurs fonctionnements, de leurs distributions intérieures et de leurs dépendances. De plus, il sert à l’orientation, la conservation, la préservation et au pilotage de ce patrimoine bâti qui garde encore une cohérence urbaine très visible à certains endroits du CVH.
En fait, ce recueil systématique des éléments patrimoniaux est circonscrit dans un noyau ancien délimité suite à l’analyse et à la datation du bâti. La méthode pour la délimitation a été proposée d’abord par l’architecte Didier Dominique, puis par Cecilia Corragio dans une étude réalisée sur la ville de Jacmel pour le compte du Ministère de l’Economie et des Finances intitulée « Etude pour la protection architecturale de la ville de Jacmel » effectuée en 2007.
Cependant, le recensement actuel des bâtiments du centre historique de Jacmel, disponible sur le site du Ministère de la Culture de la France, reflète le travail exécuté en collaboration avec ses différents experts. Toutefois, les travaux d’inventaire ont été menés par l’équipe de l’ISPAN.
En fin de compte, les multiples séances d’observation, d’analyse et de réflexion permettent de confirmer que Jacmel est loin d’être une ville banale, sans attrait et sans âme. Son passé historique, son patrimoine bâti et son architecture, constituent un cadre où le carnaval, l’artisanat et l’histoire nationale sont mis en scène. D’où des potentialités à préserver, promouvoir et exploiter.